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Est-il possible de réhabiliter un condamné à mort ? Une QPC renvoyée

Pénal - Droit pénal général, Vie judiciaire
17/12/2019
La Cour de cassation a renvoyé une QPC au Conseil constitutionnel estimant que les délais imposés pour une demande en réhabilitation, sont incompatibles quand il s’agit d’un condamné à mort dont la peine a été exécutée.
Le 6 avril 1957, un homme a été condamné à mort pour un vol à main armée, suivi du meurtre d’un gardien de la paix. Le 1er octobre 1957, il est guillotiné dans la cour de prison de la Santé. Son fils a décidé de former, le 20 mars 2018, une demande en réhabilitation judiciaire pour cette condamnation. Dans ce cadre, une QPC a été déposée et la chambre de l’instruction l’a transmise à la Cour de cassation.
 
La QPC est rédigée ainsi : « Les dispositions des articles 785 et 786, alinéa 1er, du Code de procédure pénale, qui font obstacle à une réhabilitation judiciaire consécutive à l’exécution d’une condamnation à la peine de mort, lorsque l’article 133-12 du Code pénal et l’article 782 du Code de procédure pénale prévoient que toute personne condamnée par un tribunal français à une peine criminelle peut bénéficier d’une telle réhabilitation, portent-elles atteinte au principe de nécessité des peines et au principe d’égalité, tels qu’ils sont garantis par les articles 6 et 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ? »
 
La Cour de cassation a estimé que la question devait être renvoyée au Conseil constitutionnel. Dans un premier temps, elle explique que selon les articles 133-12 du Code pénal et 782 du Code de procédure pénale, « toute personne condamnée par un tribunal français à une peine criminelle, correctionnelle ou contraventionnelle peut être réhabilitée ». Néanmoins, l’article 785 du Code de procédure pénale prévoit que la demande de réhabilitation doit être faite du vivant du condamné ou dans l’année de son décès. L’article suivant impose aux personnes condamnées à une peine criminelle un délai de cinq ans pour présenter la demande. Il dispose qu’« à l’égard des condamnés à une sanction pénale autre que l’emprisonnement ou l’amende, prononcée à titre principal, ce délai part de l’expiration de la sanction subie »
 
Ensuite, au regard de l’article 6 de la DDHC protégeant le principe d’égalité, les condamnés à la peine de mort ne devraient pas se retrouver dans une situation dont la particularité ne permet pas la réhabilitation. « Une telle différence de traitement avec les autres condamnés à une peine criminelle ne paraissant pas en rapport avec l’objet de la loi qui l’a établie » estime la Haute juridiction.
 
Dans un dernier temps, les juges précisent que « cette différence de traitement paraît d’autant moins justifiée que l’interdiction constitutionnelle de la peine de mort », prévue à l’article 66-1 de la Constitution, « peut être de nature à empêcher que les condamnations à mort soient l’objet d’une restriction, conduisant à rendre impossible leur réhabilitation, ouverte à toutes les autres condamnations criminelles ».
 
Le Conseil constitutionnel devra répondre à cette question. Une affaire à suivre …
Source : Actualités du droit