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Droit de communication de la Douane et « personnes non identifiées » : décret d’application et avis de la CNIL

Transport - Douane
Affaires - Pénal des affaires
29/03/2024
Le décret n° 2024-267 du 26 mars 2024 fixe les conditions d’application de l'article 65 bis A du Code des douanes dédié au droit de communication portant sur des informations relatives à des personnes non identifiées/non nommément désignées. Des recommandations de la CNIL sur le projet du décret n’ont pas été suivies.
Origine de l’article 65 bis A
 
Pour mémoire, la loi de finances pour 2023 a introduit dans le Code des douanes l'article 65 bis A relatif au droit de communication particulier de la Douane qui dispose : « Pour l'établissement de l'assiette et le contrôle des impôts, droits et taxes relevant de la compétence de l'administration des douanes et des droits indirects et en vue de la recherche de la fraude, le droit de communication prévu à l'article 65 peut porter sur des informations relatives à des personnes non identifiées, dans des conditions fixées par un décret en Conseil d'État pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés » (LF nº 2022-1726, 30 déc. 2022, JO 31 déc., art. 81 ; voir LF pour 2023 et Code des douanes, Actualités du droit, 2 janv. 2023).
 
Décret d’application de l’article 65 bis A
 
« Fixant les conditions d'exercice du droit de communication mentionné à l'article 65 bis A du code des douanes », le décret n° 2024-267 du 26 mars 2024 met donc en œuvre le droit de communication portant sur des informations relatives à des personnes non nommément désignées. Il prévoit « notamment », selon sa notice, que « cette procédure doit porter sur une période déterminée et sur des informations relatives à des catégories de personnes définies par des critères objectifs ».
 
L’article 1 du décret détermine ainsi les agents habilités à exercer ce droit : ceux ayant au moins le grade de contrôleur, agissant sur ordre écrit d'un agent des douanes ayant au moins le grade d'inspecteur, ledit ordre devant être présenté aux personnes envers lesquelles le droit de communication est mis en œuvre.
 
Son article 2 précise le contenu de la demande (selon la formule de la CNIL ci-dessous, il s’agit des « éléments objectifs permettant de cibler la demande de communication formulée » par la Douane) :
« 1° La nature de la relation juridique ou économique existant entre la personne soumise au droit de communication et la ou les personnes dont l'identification est demandée ;
2° La ou les informations demandées, précisées par l'un au moins des critères de recherche suivants :
a) Nature de la transaction ou du flux ;
b) Situation géographique ;
c) Seuil, pouvant être exprimé en quantité, en nombre, en fréquence ou en montant financier ;
d) Mode de paiement ;
3° La période, éventuellement fractionnée, mais ne pouvant excéder au total vingt-quatre mois, sur laquelle porte la recherche ».
 
Son article 3 prévoit le mode de transmission des informations demandées et son niveau de sécurité et fixe les délais de transmission (sans minimum ni maximum) et de conservation de ces informations ; il dispose en effet :
« Sur demande de l'administration, les informations sont communiquées sur un support informatique, par un dispositif sécurisé.
Les informations sont communiquées dans les délais fixés par l'administration. Elles sont conservées par celle-ci pendant un délai de trois ans à compter de leur réception, à l'exception de celles utilisées dans le cadre de l'une des procédures prévues aux titres II [Ndlr : comportant notamment les pouvoirs d’investigation de la Douane] et XII [Ndlr : dédié au contentieux et au recouvrement] du Code des douanes, qui sont conservées jusqu'à l'expiration des délais de toutes les voies de recours ».
 
Avis de la CNIL sur le projet de décret
 
Comme prévu par l’article 65 bis A précité, la CNIL a rendu son avis « sur un projet de décret fixant les conditions d'exercice du droit de communication mentionné à l'article 65 bis A du code des douanes » (CNIL, délib. 2023-126, 7 déc. 2023, JO 27 mars 2024). On en retient notamment, d’une part que toutes ses recommandations n’ont pas été prises en compte (par exemple s’agissant de la période ci-dessus sur laquelle porte la recherche que la Commission souhaitait voir réduite par le ministère de 24 à 18 mois), et d’autre part que la CNIL « considère qu'il revient à l'administration des douanes de préciser systématiquement, dans sa demande de communication auprès des organismes visés, les informations sur les personnes physiques ou morales qu'elle souhaite recueillir. À titre d'illustration, l'administration douanière devrait indiquer qu'elle recherche des données d'état civil pour les personnes physiques ou des numéros d'identification pour les personnes morales. En tout cas, la précision systématique des informations recherchées par l'administration douanière constitue une garantie essentielle du ciblage de la demande de communication et, a fortiori, de la proportionnalité du dispositif » (pour mémoire, cet avis de la CNIL n’est en rien contraignant pour l’administration).
 

 
 
Source : Actualités du droit